La Vérité sur…
J’ai eu la chance d’avoir appris à lire très jeune et d’aimer cela. Je me souviens que petite je lisais partout, même à table chez les invités, ne dérangeant ainsi personne. Et c’est resté depuis, il est en effet rare que je ne me balade pas avec un livre (ou un ebook, mais c’est un autre débat) dans le sac.
Mon premier souvenir littéraire est le Journal d’Anne Franck, ce qui a manifestement complètement conditionné mes lectures pour le reste de ma vie…Ne lisant majoritairement que des œuvres parlant de près ou de loin de la seconde guerre mondiale.
Ensuite, j’ai inévitablement opté pour la branche « Lettres » et au gymnase (l’équivalent du lycée), je ne dissertais que sur le rôle de la littérature (dissertations que je regrette de ne pas avoir gardées d’ailleurs). Pourtant je n’étais pas une fervente adepte de ces exercices rédactionnels, trouvant qu’on cherchait bien trop souvent à décortiquer des éléments que l’auteur n’a peut-être pas autant réfléchi. Mais… à force, cela a aiguisé ma lecture et ses sens, m’a aidé à appréhender la construction d’un texte et parfois même à aimer un roman qui n’avait rien pour au départ. (Je fonctionne d’ailleurs de la même manière avec un peintre ou une expo).
Je suis consciente qu’il est toujours plus aisé de critiquer le travail des autres sans jamais rien n’avoir entrepris soi-même à part un vague blog sans aucune prétention littéraire…mais j’avoue le faire à des fins purement égoïstes de travail cellulaire et me replonger justement dans une analyse de texte autre que juste l’histoire pour l’histoire. Ce premier essai ne sera d’ailleurs certainement pas à la hauteur mais j’espère m’améliorer à force.
… l’affaire Harry Québert, Joël Dicker
Étant donc plutôt une adepte des romans historiques des XVIIe et XVIIIe siècles, biographiques ou essais sur la deuxième guerre mondiale, vous comprendrez une certaine réticence de ma part à l’achat du livre, la vue des 600 pages n’ayant pas aidé. Sorti en 2012 lu en 2015, autant dire que j’y allais à reculons, je me suis naïvement convaincue que j’allais en avoir assez pour dix jours de plage… ERREUR! L’histoire haletante n’a occupé que deux jours de ma chaise longue!! Pour une fois je suis d’accord avec le succès (mais pas nécessairement avec le prix littéraire), d’une intrigue rondement bien menée grâce aux deux personnages principaux attachants malgré leur caractère un peu parvenu pour l’un, de vieux prof de littérature seul et sachant tout de la vie pour le second. Sans oublier l’atmosphère pesante de cette bourgade de la Nouvelle-Angleterre qui vous happe à tel point que parfois, on se verrait même à la table du diner à écouter la conversation de la serveuse et de M. Québert.
L’auteur structure son récit à « rebours » en 30 chapitres correspondant à 30 conseils pour être un (bon) écrivain mais aussi implicitement un bon lecteur. Cette mise en abîme du roman dans le roman, nous offre donc personnellement des clés de lecture dont nous descellons l’utilité au chapitre n°1…soit le dernier.
Nous entrons donc dans le monde d’un jeune écrivain new-yorkais, Marcus, célèbre pour un premier roman mais qui, bien évidemment, est victime du syndrome de la page blanche pour le deuxième avec un éditeur crapuleux aux trousses. Il cherche donc l’inspiration auprès de son ex professeur de littérature qui lui donnera non seulement des clés pour écrire mais surtout un sujet, et ce malgré lui, soit le meurtre de la petite Nola dont on découvre les restes dans son jardin.
Je passerai sur la pseudo histoire d’amour entre la jeune Nola et le vieux Québert à laquelle je n’ai malheureusement pas du tout cru (peut-être par manque de profondeur de la part de l’écrivain) ni adhéré d’ailleurs. Mais il fallait bien le nœud même de l’intrigue!
Dès lors, l’auteur prend un malin plaisir à nous transmettre des éléments à chaque fois contradictoires avec les précédents, nous laissant ainsi naïvement nous faire notre propre enquête. Inutile de se la jouer Sherlock Holmes ou les Experts à Miami, impossible d’avoir vu venir l’élucidation du mystère et on s’est, je pense, tous fait avoir à ce jeu. Bien sûr on ressent un petit peu de frustration de s’être fait balader ainsi mais cela est fait avec une telle maîtrise qu’on a rien vu venir, aucune impression d’avoir été arrosé pêle-mêle de faux indices à tout-va sans logique au risque de nous perdre.
Cependant, il ne faut pas s’attendre à de la haute littérature, comme le laisserait croire les encensements et prix reçus. Le style est relativement pauvre et on déplorera tout de même le manque de description des personnages (notamment de M. Stern) et des paysages. Je ne suis d’ailleurs pas sûre que ce soit un effet de style voulu par l’auteur afin de laisser libre-court à notre imagination…Aussi, prenons l’ouvrage pour ce qu’il est un polar qui nous tient en haleine du début à la fin, qui se lit vite et bien et nous divertit! N’est-ce d’ailleurs pas là l’un des buts principaux des romans??
Rassurez-vous Messieurs Dicker, Québert et Marcus, je n’ai aucun regret!
Joël Dicker, La Vérité sur l’Affaire Harry Quebert, Éditions de Fallois/L’Âge d’homme, août 2012. 670 pages