Soleure, ou Solothurn pour les billingues, est la ville la plus baroque des petites villes suisses, comme l’annonce le site de l’Office du tourisme. Une ville au riche passé, qui attire par son charme et sa proximité avec le Jura, thème central de l’exposition actuelle au Kunstmuseum.
Une immersion dans les « Imaginaires du Jura » au Kunstmuseum de Soleure
La raison principale de ma visite à Soleure était l’exposition « Imaginaires du Jura » au Kunstmuseum. Guidée par la curatrice Marianne Burki, cette exposition m’a fait voyager à travers l’histoire, la géographie et les mystères de cette chaîne de montagnes souvent éclipsée par les Alpes. D’autant plus que j’ignorais, ou plutôt n’avais pas réalisé, que Soleure était située au pied du Jura…


Un fil conducteur à travers le paysage
Le fil rouge de l’exposition : le Jura comme source d’inspiration artistique et scientifique. À travers dix salles, elle révèle l’évolution de la perception du paysage jurassien depuis le 18ᵉ siècle jusqu’à nos jours. De la peinture romantique à la photographie contemporaine, en passant par la vidéo, chaque œuvre met en lumière un lien intime entre l’artiste et ce territoire.

Le paysage comme sujet et protagoniste
La première salle donne le ton avec une œuvre de Caspar Wolf, une célébration du paysage qui transcende la simple représentation. Wolf, artiste du 18ᵉ siècle, se met en scène dans ses tableaux, rappelant que l’artiste est aussi un explorateur et chercheur. Cette peinture dévoile un Jura mystérieux, presque ésotérique, avec ses grottes et formations rocheuses.

L’évolution continue avec des œuvres de Barthélemy Menn, peintre du 19ᵉ siècle et mentor de Ferdinand Hodler. Menn, influencé par l’école de Barbizon, propose une vision du paysage qui se métamorphose selon la distance et le regard. Ses œuvres témoignent de l’attention portée aux moindres détails de la nature.
Une approche multidisciplinaire
Ce qui distingue cette exposition, c’est son approche plurielle : peinture, photographie, vidéo et même architecture dialoguent autour du thème du Jura. Par exemple, les travaux de Le Corbusier, inspirés par son professeur Charles L’Eplattenier, montrent comment la nature peut structurer et ornementer l’art de bâtir.

Entre géologie et imaginaire
Le Jura, avec ses grottes, ses strates géologiques et ses formations uniques, devient une véritable mine d’inspiration. Les artistes du 19ᵉ siècle, comme Courbet, s’intéressent à la géologie, rendant visibles les couches de pierre et les mystères souterrains. Un exemple frappant est la représentation de la grotte de Milandre, qui invite à une réflexion sur la force et la beauté brute de la nature.

Dans une salle dédiée, les vidéos des jumeaux Anne et Jean Rochat proposent une expérience immersive et contemplative. Leur approche vise à révéler les multiples facettes du paysage jurassien et à le magnifier.
Le paysage comme décor et témoin historique
Une autre section fascinante explore le paysage comme décor. Les photographies industrielles, comme celles liées à l’horlogerie dans le Jura, révèlent un équilibre entre l’idéalisation et la réalité parfois brute. Les peintures et panoramas du 19ᵉ siècle, quant à eux, recréent des paysages idylliques pour transporter les spectateurs dans des voyages imaginaires.

Le Jura, c’est aussi une frontière, un lieu de passage et de transition. Des artistes comme Édouard Castres, qui travaillait pour la Croix-Rouge, capturent ces instants où le paysage devient témoin de l’histoire, notamment pendant les guerres et les périodes de migration.
Un voyage dans le temps et l’imaginaire
L’exposition se termine sur une réflexion contemporaine : comment percevons-nous aujourd’hui ces paysages qui, autrefois, étaient une source de fascination et de recherche ? Les photographies et vidéos modernes, comme celles de Marie José Burki, jouent avec la lumière, les textures et les petites variations de la nature.
Le sous-sol du musée offre une rétrospective géographique et historique. Des illustrations du 19ᵉ siècle montrent à quel point le Jura était un terrain propice à l’imaginaire et aux récits de voyages pittoresques.
Vous connaissiez cette expression « être sur soleure »?
Elle daterait du 16e siècle à cause des bateliers qui devaient ramener des fûts de vin provenant des vignes de l’Archevêque, de Neuchâtel à Soleure. Pour rester hydratés durant le périple, ils faisaient avec les moyens du bord (à bord 🤪) et arrivaient cuits à Soleure.source Unireso
Une balade dans la vieille ville de Soleure
Après la visite de l’exposition et un petit sandwich avec la curatrice et la directrice du musée, j’ai profité de visiter, rapidement certes, la vieille ville de Soleure. Avec un beau soleil pareil, cela aurait été bête de s’en priver. D’autant plus qu’apparemment les Soleurois sont plus habitués au brouillard qu’au soleil. D’après la directrice du musée, c’était l’une des rares fois où l’on pouvait voir aussi bien le massif du Jura. Un petit bijou, avec ses ruelles pavées, ses bâtiments baroques et ses monuments chargés d’histoire.


La Cathédrale Saint-Ours
La Cathédrale Saint-Ours, ou St. Ursenkathedrale, est l’emblème de Soleure. Construite au 18ᵉ siècle, cette majestueuse église baroque en marbre blanc de Soleure impressionne dès le premier regard. En montant les escaliers pour m’en approcher avec mes courbatures, j’ai été fascinée par l’élégance de ses colonnes et l’harmonie de sa façade, qui semble s’élever avec une légèreté presque divine.

À l’intérieur, le style baroque continue d’éblouir : des plafonds richement décorés, un orgue imposant et une lumière naturelle qui met en valeur chaque détail. Si vous aimez les panoramas, ne manquez pas de grimper la tour de la cathédrale (ouverte à partir du 1er avril 2025). On m’a dit que la vue depuis le sommet, qui embrasse la ville, l’Aar et le Jura, est à couper le souffle.
La Tour de l’Horloge : Une fenêtre sur le temps
Un peu plus loin, la Tour de l’Horloge (Zytglogge) attire l’attention avec son charme médiéval. Datant du 13ᵉ siècle, cette tour est bien plus qu’un simple monument : c’est une véritable machine à voyager dans le temps. Elle abrite l’une des horloges les plus anciennes de Suisse encore en fonctionnement.

Son mécanisme astucieux indique non seulement l’heure, mais aussi les phases de la lune et les signes du zodiaque.
Promenade au bord de l’Aar
Pour terminer cette balade, rien de mieux qu’une promenade au bord de l’Aar. Les quais sont bordés de charmants cafés et offrent une vue reposante sur la rivière. L’ambiance était particulièrement animée, puisque ma visite coïncidait avec les Journées de Soleure, le festival de cinéma suisse.
La spécialité locale – la Solothurner-Torte
Vous me connaissez, impossible pour moi de visiter une ville ou une région, sans goûter à leur(s) spécialité(s) locale(s). Et à Soleure, c’est la Solothurner-Torte (ou la tourte de Soleure). Cette petite tourte (je parle du gâteau, pas de moi), qui fête ses 100 ans cette année, est gâteau « léger » et délicat qui se compose de couches de meringue aux noisettes et d’une généreuse ganache pralinée au beurre. Ni trop sucré, ni trop lourd, ça fond en bouche.


Vous la trouverez en divers formats chez Suteria, Kaffeehalle Solothurn, ou Confiserie Hofer.
Infos pratiques
🚂 à 1h30 de Lausanne en train, on peut facilement faire l’aller-retour dans la journée
🖼️ Musée d’art/KunstMuseum, entrée gratuite toute l’année. Ouvert du mardi au vendredi de 11h à 17h et les samedis et dimanches de 10h à 17h. Fermé le lundi.
⛪️ Cathédrale Saint-Ours, entrée gratuite. Ouvert tous les jours de 8h à 18h30, la tour, pour une vue panoramique, n’ouvre que depuis le 1er avril 2025. On ne peut visiter la Cathédrale durant les services religieux.